Le nouveau gouvernement de Michel Barnier est déjà menacé par une motion de censure au Parlement

Paris (AFP) - Le nouveau gouvernement du Premier ministre français Michel Barnier, durement gagné, a été mis sous pression dès le premier jour dimanche, alors que les menaces de motion de censure au Parlement se multipliaient.

La longue attente d'un gouvernement fonctionnel après que le président Emmanuel Macron a convoqué des élections générales anticipées a pris fin après 11 semaines samedi soir avec la nomination d'un cabinet marquant un net virage à droite.

Les opposants politiques de gauche ont déjà annoncé qu'ils contesteraient le gouvernement de Barnier avec une motion de censure dès le mois prochain, les politiciens d'extrême droite critiquant également sa composition.

Les partisans du Nouveau Front populaire (NFP), parti de gauche, estiment que le nouveau gouvernement se moque du résultat des élections.

Lors des élections de juillet, une alliance de gauche appelée le Nouveau Front populaire (NFP) a remporté le plus grand nombre de sièges parlementaires de tous les blocs politiques, mais pas suffisamment pour obtenir une majorité absolue.

Marine Le Pen, leader historique de l'extrême droite, a quant à elle vu son Rassemblement national émerger comme le plus grand parti de l'Assemblée.

Macron avait fait valoir que la gauche était incapable de rassembler suffisamment de soutien pour former un gouvernement qui ne serait pas immédiatement renversé par le Parlement, et avait rejeté un candidat du Rassemblement national en raison de l'héritage extrémiste du parti.

Il s'est plutôt tourné vers Barnier pour diriger un gouvernement s'appuyant sur le soutien parlementaire principalement des alliés de Macron, ainsi que des groupes conservateurs Les Républicains (LR) et centristes.

- « Pas d’avenir » -

Les discussions sur la répartition des postes ministériels se sont poursuivies jusqu'à l'annonce officielle de samedi, ont indiqué des sources internes, avec des moments de forte tension entre le président et son Premier ministre.

Le chef de file de l'extrême gauche Jean-Luc Mélenchon a qualifié la nouvelle composition de « gouvernement des perdants des élections générales », affirmant que la France devrait « s'en débarrasser » « le plus vite possible ».

Mélenchon a qualifié le nouveau gouvernement de « perdants des élections générales »

Avant même l'annonce, des milliers de personnes sont descendues dans les rues de Paris et d'autres villes françaises samedi dans une manifestation de gauche pour dénoncer ce qu'elles appellent un déni des résultats des élections de juillet.

Samedi, le président du Parti socialiste, Olivier Faure, a qualifié le gouvernement Barnier de « gouvernement réactionnaire qui fait un doigt d'honneur à la démocratie ». Dimanche, il l'a qualifié de « gouvernement le plus à droite de la Ve République ».

Macron comptait sur une position neutre de l'extrême droite, mais le chef du Rassemblement national, Jordan Bardella, a déclaré que le nouveau gouvernement n'avait « aucun avenir ».

Même si les alliés de Macron ont dû abandonner certains ministères clés, ils ont tout de même obtenu 12 portefeuilles sur un total de 39.

« Ce n'est pas un nouveau gouvernement, c'est un remaniement », a ironisé le chef du Parti communiste, Fabien Roussel.

- 'Comme avant' -

L'ancien président français François Hollande, un socialiste, a qualifié le gouvernement de « identique à celui d'avant, mais avec une présence encore plus forte de la droite » et qui infligerait « des mesures douloureuses à nos concitoyens ».

Il a déclaré qu’une motion de censure était « une bonne solution ».

Bardella a déclaré que le nouveau gouvernement marquait « un retour au macronisme » et n'avait « aucun avenir ».

Pour être adoptée, une telle motion doit réunir la majorité absolue au Parlement, ce qui forcerait alors le gouvernement à démissionner immédiatement – ​​un scénario actuellement peu probable puisque l’extrême droite et le bloc de gauche, ennemis jurés, devraient voter à l’unisson.

Faure a déclaré que les socialistes prévoyaient de déposer une motion de censure le 1er octobre après le discours de politique générale de Barnier au Parlement prévu ce jour-là, mais il a reconnu que « cela échouera probablement » en l'absence de soutien du Rassemblement national, qui a déclaré qu'il attendrait avant de prendre toute mesure contre le gouvernement.

Le premier grand test pour Barnier, surtout connu à l'international pour avoir mené les négociations sur le Brexit entre l'Union européenne et la Grande-Bretagne, sera de soumettre un projet de budget 2025 abordant la situation financière de la France, qu'il a qualifiée cette semaine de « très grave ».

La France fait l'objet d'une procédure formelle pour violation des règles budgétaires de l'Union européenne et doit montrer qu'elle fait un effort sérieux pour redresser sa situation financière.

La tâche difficile de soumettre un projet de budget au Parlement le mois prochain revient à Antoine Armand, 33 ans, le nouveau ministre des Finances, qui a déclaré qu'il pourrait inclure des augmentations d'impôts « exceptionnelles et ciblées ».

Parmi les autres nouveaux visages à des postes clés du gouvernement figurent le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, tandis que le ministère de l'Intérieur a été confié à Bruno Retailleau, des Républicains, dont les références à droite ont créé un malaise même dans le camp de Macron.

Le ministre de la Défense, Sébastien Lecornu, proche de Macron, a conservé son poste.

Barnier devrait faire une apparition télévisée plus tard dimanche.

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