L'Irlande du Nord est sans gouvernement opérationnel depuis février

Belfast (AFP) - Le gouvernement britannique devait convoquer vendredi les deuxièmes élections de cette année en Irlande du Nord après que les législateurs britanniques et régionaux n'ont pas réussi à résoudre une impasse sur les règles commerciales post-Brexit.

Une date limite pour reprendre le gouvernement décentralisé à l'assemblée de Stormont a été dépassée à minuit, incitant le ministre d'Irlande du Nord Chris Heaton-Harris à tweeter qu'il était "extrêmement déçu".

"Aujourd'hui, Stormont pourrait prendre des décisions pour atténuer les défis auxquels les gens sont confrontés. Au lieu de cela, le devoir légal d'agir m'incombe en tant que secrétaire d'État… Je fournirai une mise à jour à ce sujet », a-t-il tweeté.

La ministre britannique de l'Environnement, Therese Coffey, a quant à elle déclaré que l'échec de la sortie de l'impasse signifiait qu'une élection allait désormais "définitivement avoir lieu".

Jeffrey Donaldson, chef du Parti unioniste démocrate pro-britannique, a défendu le blocage par son parti du rétablissement du partage du pouvoir, dans le cadre de sa protestation contre le soi-disant protocole d'Irlande du Nord régissant les règles commerciales post-Brexit.

Il a déclaré que son parti ne pouvait pas "nommer des ministres à un exécutif qui est tenu d'imposer un protocole qui nuit à notre économie, nuit à notre peuple et nous empêche d'avoir accès aux médicaments et autres fournitures vitales du reste du Royaume-Uni".

Donaldson a ajouté qu'il était "prêt à former un exécutif dès que cette solution serait trouvée" mais que son parti attendait depuis près de trois ans.

"Nous avons besoin d'une solution", a-t-il souligné.

Donaldson a déclaré aux journalistes jeudi que le parti ne voterait pas pour un nouveau président

L'expiration du délai légal pour la création d'un exécutif conjoint entre les nationalistes pro-irlandais et les syndicalistes pro-britanniques est intervenue après que les partis de la province ont tenté en dernier recours de redémarrer l'assemblée décentralisée.

Lors d'une séance d'argumentation jeudi, les législateurs se sont brièvement réunis pour la première fois depuis des mois pour une séance spéciale, mais n'ont pas réussi à élire un président, de sorte qu'aucun nouveau gouvernement n'a pu être créé.

Le DUP a boycotté l'assemblée depuis février, appelant à la révision ou à l'abandon complet du protocole.

- 'Confrontation perpétuelle' -

Le nouveau Premier ministre britannique Rishi Sunak avait imploré les partis de "revenir à Stormont", arguant que les Irlandais du Nord "méritent un exécutif pleinement fonctionnel et élu localement", a déclaré jeudi son porte-parole officiel.

Heaton-Harris, un archi-eurosceptique nommé à son poste le 6 septembre seulement, a insisté sur le fait que si le délai du gouvernement britannique expirait vendredi, il n'hésiterait pas à déclencher des élections, le 15 décembre étant la date prévue pour le nouveau scrutin.

L'Irlande du Nord est maintenant sans gouvernement fonctionnel depuis neuf mois, le parti pro-irlandais Sinn Fein remportant une première élection historique en mai, ce qui complique davantage la situation politique.

La dirigeante du Sinn Fein, Michelle O'Neill – qui devait devenir première ministre si l'exécutif était relancé – a condamné «l'impasse perpétuelle du DUP avec le public, dont la majorité ne parle pas ni ne représente en fait».

Le DUP insiste sur le fait que le protocole – convenu par Londres et Bruxelles dans le cadre de l'accord britannique sur le Brexit de 2019 – doit être traité en premier.

Il affirme que le pacte, qui maintient effectivement l'Irlande du Nord dans le marché unique et l'union douanière de l'Union européenne, affaiblit la place de la province au sein du Royaume-Uni.

De nombreux syndicalistes affirment également que cela menace le délicat équilibre de paix entre la communauté nationaliste pro-irlandaise et ceux qui sont en faveur d'une union continue avec la Grande-Bretagne.

Chris Heaton-Harris, ministre britannique de l'Irlande du Nord, est un archi-eurosceptique

Le protocole a été convenu pour éviter le retour d'une frontière terrestre avec la République d'Irlande, qui reste membre de l'UE.

L'élimination de cette frontière dure était un élément clé de l'accord du Vendredi Saint de 1998, qui a mis fin à trois décennies de violence sectaire en Irlande du Nord.

Le gouvernement conservateur britannique, qui a eu trois Premiers ministres en deux mois, a exhorté Bruxelles à accepter des révisions globales du protocole. Londres est également en train d'adopter une législation controversée pour l'annuler unilatéralement.

Cela fait craindre une guerre commerciale et une détérioration des relations avec l'Europe alors que le paysage économique est déjà morose.