La grève nationale de mardi est le plus grand défi des syndicats à Emmanuel Macron depuis qu'il a remporté un nouveau mandat présidentiel en mai

Paris (AFP) - Des milliers de personnes sont descendues dans la rue à travers la France mardi et les navetteurs ont été retardés alors que les syndicats organisaient une grève nationale pour des salaires plus élevés, alors qu'ils restent dans l'impasse avec le gouvernement sur les débrayages dans les dépôts pétroliers qui ont déclenché des pénuries de carburant.

"C'est dommage qu'il ait fallu des blocages pour que quelque chose se produise", a déclaré Nadine, une employée de 45 ans dans l'industrie métallurgique qui faisait partie de plus de 1 000 manifestants à Strasbourg, dans le nord-est de la France.

"Mais aujourd'hui, si nous ne bloquons rien, personne n'écoute", a-t-elle déclaré.

Parmi une foule de quelque 1 800 personnes défilant dans la ville méridionale de Montpellier, Magali Mallet, une secrétaire médicale, a déclaré qu'elle était là parce que de nombreux travailleurs « vivaient sur le fil du rasoir ».

Une grève des transports n'a pas provoqué de perturbations majeures dans tout le pays, malgré le fait que les navetteurs se rendent dans la capitale depuis sa banlieue tard mardi matin.

La grève plus large intervient après que les travailleurs de plusieurs raffineries de pétrole et dépôts exploités par le géant de l'énergie TotalEnergies ont voté pour prolonger les débrayages.

Leur action revendicative a gravement perturbé la distribution de carburant dans tout le pays, en particulier dans le nord et le centre de la France et la région parisienne.

Les automobilistes se sont précipités pour faire le plein alors que la grève du carburant, qui dure depuis près de trois semaines, a eu un effet d'entraînement sur tous les secteurs de l'économie.

- 'Conséquences sérieuses' -

Le Premier ministre Elisabeth Borne a déclaré que moins d'un quart des stations-service du pays connaissaient des pénuries, contre 30% auparavant.

Le gouvernement du président Emmanuel Macron a utilisé des pouvoirs de réquisition pour forcer certains grévistes à retourner ouvrir des dépôts de carburant, une décision qui a exaspéré les syndicats mais qui a jusqu'à présent été confirmée par les tribunaux.

Mais son gouvernement pousse également les patrons à reconnaître les revendications salariales, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin déclarant mardi qu'il y avait "un problème de salaire" en France, et exhortant les employeurs "à augmenter les salaires lorsque cela est possible".

Les travailleurs ont également fait grève dans le secteur de l'énergie nucléaire, ce qui pourrait entraver les efforts de redémarrage des réacteurs pour des travaux de maintenance ou de sécurité.

À la centrale nucléaire nord de Gravelines, Henia Abidi, technicienne de 32 ans, a déclaré qu'elle n'était généralement pas du genre à protester.

« Mais maintenant qu'il s'agit d'inflation et de nos salaires, je me sens vraiment concerné. Je n'abandonnerai pas », a-t-elle déclaré, ajoutant que tout, de la nourriture au carburant, était devenu cher.

L'opérateur de réseau électrique RTE a prévenu mardi que "toute extension du mouvement social" dans les centrales nucléaires aurait de "graves conséquences" sur l'approvisionnement en électricité cet hiver.

Les syndicats de gauche CGT et FO ont appelé à la grève nationale pour exiger des salaires plus élevés et pour protester contre les réquisitions du gouvernement des travailleurs du pétrole

Macron a déclaré la semaine dernière que seuls 30 réacteurs nucléaires sur 56 étaient en ligne, alors que le pays espérait en avoir 45 en état de marche d'ici janvier.

Mais le fournisseur d'énergie public français EDF a annoncé samedi qu'il reportait les plans de remise en service de cinq des réacteurs arrêtés.

Les syndicats de gauche CGT et FO ont appelé mardi à la grève nationale pour une augmentation des salaires et contre les réquisitions gouvernementales d'installations pétrolières.

Cette action est le plus grand défi des syndicats à Macron depuis qu'il a remporté un nouveau mandat présidentiel en mai.

Le journal Libération a publié en première page une caricature de Macron balayé et accroché au bord d'un mégaphone géant diffusant le message de manifestants en colère.

- Automne tendu ? -

Les syndicats d'autres industries et du secteur public avaient également annoncé des actions pour protester contre le double impact de la flambée des prix de l'énergie et de l'inflation globale sur le coût de la vie.

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Au-delà des travailleurs des transports, les syndicats avaient espéré faire émerger du personnel dans des secteurs tels que l'industrie alimentaire et la santé.

Le ministère de l'Education a déclaré que moins de 6% de ses travailleurs avaient débrayé, bien que ce taux ait atteint 23% pour les écoles professionnelles.

Leur action lancera ce qui pourrait être un automne et un hiver tendus alors que Macron cherche également à mettre en œuvre sa politique intérieure phare de relèvement de l'âge de la retraite en France.

La pression économique en partie causée par l'invasion de l'Ukraine par la Russie, ainsi que l'échec du parti de Macron à obtenir une majorité absolue lors des élections législatives de juin, ne font qu'ajouter à l'ampleur de la tâche.

Un sondage du groupe Elabe a révélé qu'un Français sur trois serait prêt à participer à une grève ou à une manifestation dans les semaines à venir pour exiger des augmentations de salaire face à la flambée de l'inflation.

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